Essai moto QJ Motor SRK 800 RR (2024)

A grands pas

Quatre cylindres en ligne de 778 cm3, 95 ch et 78 Nm de couple, 207 kg tous pleins faits, 8 999 euros

Quand on s’essaie au RR chez QJ Motor, premier constructeur chinois en plus de 250 cm3, on prend garde à ne pas s’emballer et jouer la carte de l’accessibilité. Le RR chez les marques en place sur ce créneau, c’est plus de 33.0000 euros chez BMW (M 1000 RR), 22.000 euros chez Honda (CBR 1000 RR) ou 29.999 euros chez Kawa (ZX-10 RR). L’indice financier de la double consonne varie selon le niveau de performance mais aussi d’image. Les sportives haut de gamme ne concernent plus les jeunes permis ou les classes populaires, comme c’était encore le cas du temps de la Suz’ GSX-R 1100, il y a 30 ans. Elle valait un peu plus de 50 000 francs en 1990, environ 13.500 euros d’aujourd’hui, inflation comprise ; près de la moitié moins d’une 1000 de pointe actuelle. La puissance a pris 70 ch, le poids a fondu d’une quarantaine de kilos, l’électronique a pris le contrôle… Les radars aussi. La SRK 800 RR ramène tout le monde à la raison : 95 ch, 207 kg tous pleins faits et 8 999 euros. Mais la sportive n’est jamais un choix raisonnable.

Découverte

Le célèbre importateur bourguignon, la SIMA, s’occupait jadis (enfin il y a une trentaine d’années) des marques les plus prestigieuses : Ducati, MV Agusta, Husqvarna… Et faisait rouler des pilotes devenus célèbres sur ces motos, comme Stéphane Peterhansel, Stéphane Chambon, Boris Chambon… Aujourd’hui, la SIMA, qui a créé Mash, importe Moto Morini, Hyosung, Royal Enfield et depuis peu QJ Motor. Des motos plus sages. La compétition ne représente plus un vecteur possible pour porter l’image de ces motos, malgré l’Ipone Continental Cup où se bagarrent des Royal Enfield, certes affûtées mais bon…

Et QJ a tout à prouver, comme les Japonais dans les années 60. Eux aussi prisaient la compétition pour montrer leur sérieux, leur passion. Les constructeurs chinois n’ont pas pris ce pli. Sauf QJ, qui fait une timide incursion en championnat du monde Supersport avec une SRK 800 préparée, pas encore suffisamment pour permettre à Raffaele de Rosa, son pilote, d’entrer dans les points. Il ne sera de toute façon présent que sur quelques courses. On retrouve aussi QJ affiché en grande largeur sur les carénages du team Gresini en Moto2. Si la marque chinoise ne pointe pour l’instant qu’un orteil en course, sa détermination est claire, elle veut gagner les marchés occidentaux et se hisser, peu à peu, au niveau des références. Ce n’était en revanche pas très subtil, stratégiquement, de copier autant les lignes de la Ducati Panigale… QJ prête facilement le flanc aux critiques en jouant ce jeu. Mais encore une fois, les Japonais ont eu le même travers, comme Kawasaki avec la 650 W1 en 1968, reprenant les lignes et caractéristiques moteur des meilleures Anglaises.

On dit aussi le moteur de la SRK 800 inspiré du quatre cylindres Honda de la CB 650 R et c’est vrai que la comparaison des carters moteur ou du dessin des collecteurs d’échappement le laissent croire.

Il cube 778 cm3, cylindrée intermédiaire aujourd’hui, avec une course de piston portée à 55,2 mm par rapport au bloc Honda 650. D’ailleurs, à 30 ch près, la SRK rappelle la Honda CBR 900 RR de 1992, avec ses 207 kg tous pleins faits. Mais 30 ch quand même… La couple du moteur QJ culmine à 78 Nm à 8 500 tr/min, supérieur à celui d’une autre CBR compétitive en termes de tarif, la 600 RR (11.699 €), qui atteint 63 Nm à 11 500 tr/min. L’électronique de la SRK est en revanche moins étendue. Elle propose deux modes moteur, Normal et Sport, un contrôle de traction déconnectable, deux capteurs de pression pneumatique et un ABS classique.

Le cadre périmétrique en alu et même les platines repose-pieds rappellent aussi la CB 650 R. D’ailleurs les empattements sont identiques (1 450 mm), ainsi que les hauteurs de selle (810 mm). La QJ est équipée de suspensions Marzocchi, marque qui appartient à la même holding que QJ, l’immense groupe Geely, qui possède Lotus, Volvo mais aussi Benelli. Fourche comme amortisseur (avec bonbonne séparée) sont réglables en précharge de ressort, compression et détente hydraulique. Le freinage Brembo figure en milieu de gamme du catalogue, avec deux disques de 320 mm à l’avant.

En selle

La SRK s’observe au regard de son prix. Dès lors, sa finition est largement au niveau, les assemblages plastiques ou les fonderies révèlent la qualité de fabrication. Seules les soudures du cadre se montrent un peu grossières. Le petit écran TFT de 5 pouces est complet, avec la température moteur et la jauge à essence en affichage permanent. On ne se perd pas dans les modes ou possibilités infinies qu’on trouve ailleurs et c’est parfait. Jouer la carte de la simplicité et de l’efficacité devient un atout, selon moi.

L’assise convient immédiatement, la selle est un peu ferme, on reste sur une sportive, mais les bracelets n’obligent pas à se casser le dos. La sonorité du quatre pattes, assez aiguë, s’enrage un peu dès 4 000 tr/min et c’est très sympa. De suite, l’équilibre paraît évident, sans lourdeur du train avant. Le frein avant manque un peu de progressivité, pour pinailler.

En ville

Franchement, la SRK 800 est facile, toujours sous contrôle, son moteur offre beaucoup de souplesse, comme tout quatre cylindres en ligne. Les yeux fermés, personne ne parierait sur une moto chinoise et son lot de poncifs, dû aux premières versions essayées il y a une dizaine d’années. Cette QJ s’est hissée au niveau des standards des motos japonaises de milieu de gamme. Le confort, pour une sportive, ne fait pas défaut, ni la souplesse des commandes. La précision du train avant, importante aussi en ville (interfile, périphériques…), laisse le regard guider la SRK.

Voies rapides et autoroute

La protection pêche, la bulle est trop courte, comme souvent sur les sportives, pour ne pas casser la ligne. Pas idéal pour les plus d’1m75. Rien d’étonnant. 130 km/h, 5 000 tr/min, l’étagement de la boîte reprend des ratios répandus. Évidemment, la place manque pour arrimer un bagage, de même que les points d’ancrage, mais là aussi, classique.

Départementales

Les environs de Beaune regorgent de petites routes souvent bosselées et sinueuses, entre les vignes ou les champs, traversant des villages authentiques avec leurs maisons en pierre de Bourgogne. On peut soit opter pour un mode tourisme et la SRK 800 s’y montre docile et bienveillante, plutôt confortable pour une sportive. Son quatre cylindres se laisse facilement oublier aux mi-régimes, sans hoquets ou ratés et la boîte de vitesse est douce, sans accroche ni point mort, sauf parfois entre la première et la seconde.

On peut aussi opter pour le mode sportif, que la ligne de la SRK suggère. Le moteur s’emporte alors jusque 11 000 tr/min, dans un univers sonore devient plus pointu encore, stimulant ; le moteur monte avec progressivité dans les tours, avec un regain autour de 8 000 tr/min, mais sans step particulier. On ne parlera pas de caractère moteur, rare avec les quatre cylindres en ligne (sauf particularité, comme le Crossplane des Yam’ R1 ou la brutalité des 1000 MV Agusta), plutôt d’efficacité. La partie-cycle est très saine, pour peu que les pneus soient montés en température. Il s’agit ici de Maxxis Supermax mais la SRK 800 sera vendue avec des Pirelli. Les Maxxis, eux réclament un peu de temps. En témoigne une séance photo dans une épingle hyper serrée. J’accélère un peu tôt sur l’angle et l’arrière part à l’équerre, mais avec progressivité : la chute est évitée. Une fois les pneus chauds, le rythme étonne. Les suspensions amortissent avec progressivité, aucune réaction inattendue ou parasite. Ça file en confiance, avec un train avant toujours rassurant, une facilité à se déplacer sur la moto, une bonne stabilité sur l’angle. La SRK se place au niveau des meilleurs roadsters, auquel son prix la ramène, mais au-dessus de sportive du même prix, comme la Kawasaki Ninja 650, moins puissante (68 ch) mais seulement 700 euros moins chère. Reste la Honda CBR 600 RR, qui revient cette année, 2 600 euros plus chère mais aussi plus performante, efficace et elle bénéficie d’une image autrement plus installée.

Partie-cycle

La répartition des masses et les valeurs de la géométrie de la partie-cycle se placent dans des standards éprouvés. La SRK 800 rassure, ne montre aucune faiblesse à l’attaque, ses suspensions Marzocchi allient confort et efficacité. La QJ se met à un niveau encore jamais atteint pour une marque chinoise. Les 207 kilos tous pleins faits ne se laissent pas percevoir. La hauteur de selle permet à quelqu’un d’1m68 de mettre facilement un pied à terre.

Freinage

Le double disque avant freine bien, la puissance n’est pas dingue mais suffisante. La progressivité pourrait être améliorée, l’attaque au levier est un peu raide. L’ABS ne se déclenche pas intempestivement, même sur les bosses. Le frein arrière est progressif mais là, l’ABS se fait plus rapidement présent.

Confort/duo

Le confort est de très bon niveau, tant au niveau de l’assise que de la position de conduite. Les suspensions, je l’ai dit, égalent les meilleures motos de ce créneau de prix. Le duo, en revanche, n’a pas été une priorité, comme pour toute sportive.

Consommation

L’essai s’est déroulé à un rythme assez rapide, la SRK 800 RR a bu en moyenne 5,9 l/100 km lors de l’essai.

Essai vidéo

Conclusion

Ça y est, les motos chinoises progressent vite et ne tarderont pas à monter encore en gamme. QJ Motor sera parmi les premières marques à figurer au meilleur niveau. Son défi, aujourd’hui en France, relève plutôt de l’image et de la confiance. Elle est une marque chinoise comme les autres, elles peinent à se démarquer parce qu’elles n’offrent pas un récit, qu’il passe par la compétition, le voyage ou autre narration singulière. CF Moto y travaille avec ses trails, QJ s’y emploie en mettant un pied en compétition, tout reste à faire. Mais pour le moment, s’afficher sur Instagram, en terrasse, au Vigeant ou à Lédenon avec une SRK 800 RR, ça ne claque pas autant qu’une Yam’, Honda ou Ducati. Et probablement que QJ n’aurait pas dû imiter les lignes de ces motos, tant pour se créer une identité que pour mettre fin aux quolibets de “copieur”.

Mais en soi, la SRK 800 prouve le sérieux et la détermination de QJ. Cette sportive, pour 9.000 euros, sera capable de faire de la piste, de la petite route à bon rythme, du quotidien embouteillé. Elle se place entre une Kawasaki Ninja 650 et une Honda CBR 600 RR, comme expliqué dans l’essai et au niveau de la nouvelle Suzuki GSX-8R, à 9.699 euros, qui sort 12 ch de moins. La SRK a son mot à dire parmi ses motos, eu égard à son tarif. Elle sera disponible début juillet, au sein d’un réseau qui n’est pas encore déterminé mais comprendra, selon l’importateur SIMA, environ 80 points de vente. Elle sera garantie trois ans.

Points forts

  • Equilibre de la partie-cycle
  • Tarif
  • Finition correcte
  • Moteur efficace

Points faibles

  • Attaque du frein avant un peu raide
  • Manque d’originalité de la ligne
  • Protection

La fiche technique de la QJ Motor SRK 800 RR

Conditions d’essais

  • Itinéraire : routes sinueuses à revêtement variable, sec.
  • Météo : nuageux, 12°C
  • Kilométrage de la moto : 1.100 km
  • Problème rencontré : ras

Disponibilité / prix

  • Coloris : rouge - noir
  • Prix : 8 999 euros

Equipements de série

  • ABS
  • Traction Control
  • 2 riding modes

Equipement pilote

  • Casque X-Lite Carbon
  • Blouson cuir Segura
  • Gants cuir Helstons
Essai moto QJ Motor SRK 800 RR (2024)
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Author: Wyatt Volkman LLD

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